mercredi 30 juin 2010

« Objets inanimés avez-vous donc une âme ? »

La remarque de Lamartine éclaire le brouillard dans lequel les Cités cherchent un chemin. Pour donner un poids concret au passé, une conteuse s’était munie d’objets concrets pour narrer l’aventure de Cendrillon : un éventail qui date du dix-huitième siècle et un collier grec, copie de celui que portait la reine d’Argolide 800 ans avant notre ère. Etonnés par la forme inusitée des perles dorées, les jeunes semblaient touchés que la vieille reine ait pu déjà connaître l’histoire de la jeune fille méprisée qui épouse un prince : « Il y a donc toujours eu quelqu’un pour rapporter ce conte à des descendants des poètes grecs. Et la transmission ne s’est pas arrêtée… » Le temps qui court de siècle en siècle et de pays en pays prenait un bel habit doré pendant que les jeunes se passaient le collier de mains en mains.

Ce fut encore autre chose quand l’éventail fermé tint lieu de baguette magique avant de se déplier pour montrer d’un côté le château du prince et de l’autre les parures des belles dames invitées ! Ce qui saisit l’attention de cette jeunesse c’était la monture d’ivoire incrustée de minuscules feuilles d’argent : « On dirait qu’il vient de chez nous » s’exclama un adolescent d’origine algérienne. La réponse « C’est qu’il est catalan, donc méditerranéen. C’est un cadeau que m’a fait ma grand’mère qui l’avait reçu elle-même de sa propre grand’mère » laissa le groupe songeur. « C’est vraiment à toi ? Nous, on n’a plus des vieilles choses comme cela dans nos maisons, parce que tout est resté au pays quand les parents sont venus. C’est dommage ! On se souviendrait mieux. »

Peut-être, en effet, que la sagesse des millénaires passés formerait plus profondément les esprits si la durée de la réflexion humaine pouvait s’éprouver avec les doigts.

Peut-être le rapprochement entre les civilisations serait-il plus envisageable si les objets familiers présentaient plus souvent leur origine biculturelle. Les visites dans les musées qui exposent des objets d’outre-mer sont d’autant plus intéressantes qu’elles sont doublées de découvertes analogues au Louvre ou à la Villette, qu’il s’agisse de parures, de tissus ou d’outils.

CIFRI

Cf. Les contes de ma mère l’oie, Charles Perrault