mercredi 21 décembre 2011

Au pied d’un vieil arbre

Ses feuillages tombés, nous voici plus attentifs à la structure de nos arbres, elle a inspiré de grands peintres. Comment ne pas affiner notre regard en reconnaissant Mondrian dans cette architecture géométrique ? Mais il ne faut pas oublier les racines, bien séparées au sol et conditions de la vie même du vivant qui nous offre sa protection. Racines multiples mais jamais concurrentes, racines qui couronnent au sol la vigueur du tronc qui pointe vers le ciel. Il arrive qu’on trébuche sur ces formes parce qu’on les a oubliées, mais même fâché contre elles, on ne les coupe pas, par respect pour l’arbre ! Pour quoi priverions nous nos vieilles civilisations de leurs vigoureuses racines ? Comment ferions-nous pour effacer aux yeux de nos jeunes les apports successifs des envahisseurs qui ont enrichi nos compétences, Celtes, Gallo-romains, Grecs, Musulmans, Vikings…Nos frigidaires assemblent des pièces fabriquées loin de nous, et notre jeunesse porte des grâces venues d’ailleurs. 

CIFRI

vendredi 25 novembre 2011

Pourquoi et comment faisaient-ils ?

Les bilans du tourisme français des dernières vacances montrent l’importance des musées qui attirent tant de touristes que cela légitime de fortes dépenses pour leur rénovation…Symétriquement, pour attirer leurs clients, les publicités des agences de voyage multiplient les photographies des grandes œuvres d’art, de l’Acropole au Taj Mahal, des bateaux wikings à la mosquée de Cordoue.

Pourquoi sommes nous friands de ces réussites étrangères et si inquiets de l’irruption des immigrés dans notre culture française ?

Cette appréhension nous prive de réfléchir à un autre constat : Architectes comme artisans ont réussi ces prouesses millénaires en utilisant des notions scientifiques précises mais différentes de celles de Pythagore et d’Euclide. Comment faisaient-ils ?

CIFRI

vendredi 28 octobre 2011

Des larmes au sourire

L’évocation bien précise des doutes, des échecs, des épreuves du monde actuel de l’Ecole sont une consolation aussi bien pour les adultes que pour leurs élèves en situation d’échec.


L’optimisme de ceux qui se sont sortis d’affaire aurait pourtant un côté utopique qui rendrait leur expérience décourageante si il ne se complétait pas de la confidence des douleurs de l’enfant maltraité (1), du petit déchiré entre deux cultures (2), de celui qui est en échec scolaire (3), et du professeur démuni devant des adolescents révoltés (4). Grâce à qui Grâce à quoi ont-il surmonté leurs peines ?

1 - José Mauro de Vasconcelos « Mon bel oranger », Stock 1971
2 - Camara Laye « L’enfant noir », 1963
3 - Daniel Pennac « Chagrin d’Ecole », Gallimard , 2007, Prix Renaudot
4 - François Bégodeau « Entre les murs » Ed.Vericales, 2006
Film de Laurent Cantet, Palem d’Or au festival de Cannes en 2008

CIFRI

vendredi 21 octobre 2011

L’arrosage des plantes

Cet été, toutes les publicités horticoles, toutes les recommandations publiques pour économiser l’eau en période de sècheresse nous ont parlé des racines à privilégier. Et, au proche automne, les conseils multiplient les précautions exigeantes pour déplacer les plantes dans le même jardin. En même temps, les vétérinaires soulignent l’importance de l’éducation des autres vivants, ceux qui ont quatre pattes. Et ces spécialistes s’attachent à décrire l’origine des animaux et ses conséquences.

Si ces lois de la Vie, si fruste soit-elle, sont incontournables, sous peine de la mort des végétaux ou du danger des animaux, comment les négliger quand il s’agit de petits d’hommes ?
                                                                                                                         
Oû trouver des renseignements sur les racines des jeunes ?

 Les livres de botanique offrent dessins et informations aux  jardiniers d’occasion qui tiennent à leurs buissons. Mais comment les éducateurs trouveraient-ils le temps de se renseigner sur les racines des élèves d’une classe qui réunit des jeunes de partout ? C’est hors de propos de le leur demander. Pourtant s’ils veulent peindre leur classe avec la même couleur, la couche superficielle s’écaillera vite sous la poussée des teintes d’origine.

Heureusement, des romans livrent une initiation d’autant plus précieuse qu’elle est faite de souvenirs imagées et souvent émouvants. L’enfance africaine racontée par Hamadou Hampâté Bâ , celle du petit noir encore  colonisé qui s’appelait Camara Laye, les parfums qui embaument les récits de  l’académicien Tahar Ben Jelloun détendent leur lecteur sans même que celui-ci perçoive la nouvelle graine qui ensemence son esprit.

CIFRI

vendredi 14 octobre 2011

L’arbre de l’apprentissage

Le développement de la connaissance se fait par instants d’apprentissage, qu’on peut souvent repérer dans  le temps – c’est le rôle des programmes scolaires – ou dans l’espace -  la classe, ou la sortie, ou le lieu d’une rencontre.  Albert Camus racontera : «  Je vois encore la salle… » Mais, la portée de cet acte ne peut être privé de tout ce qui l’a préparé : la culture familiale, l’avenir espéré. Comment négliger les racines de l’apprentissage ?

 Tout homme est toujours, forcément, dressé sur une terre qu’il touche de ses deux pieds et qui est lourde de tous les pas qui l’ont foulée et, en même temps, il ne peut échapper à l’horizon qui éclaire son présent. « L’homme qui marche », le tableau d’Alberto Giacometti magnifie cette réalité. La stature de l’homme suppose deux lignes invisibles : ce qu’il y a sous ses pieds et la ligne d’horizon que suppose le soleil arrondi en haut de la composition.

CIFRI

vendredi 7 octobre 2011

La leçon des récits de vie

Rares sont les auteurs qui peuvent raconter leurs histoires personnelles en offrant au lecteur une leçon sur un monde qu’il ignore. Leur lecture n’en est que plus précieuse !

Certes, la douleur qui bouleverse tant de récits de guerres ou de révoltes sociales est bien le résultat des incompréhensions entre les cultures, L’émotion ressentie devant les catastrophes est justifiée, mais elle voile quand même la réalité de la rencontre entre deux civilisations. Elle oblitère les analogies qui se trouvent sur des continents différents. Elle risque le mépris mais compromet la nécessaire collaboration.

Il faudrait comprendre l’autre mais les chances et les peines de la juxtaposition des cultures ne sont pas le lot de tous les habitants de l’Hexagone, comment le descendant de Vercingétorix va-t-il comprendre l’immigré ? saisir les ressemblances plutôt que les oppositions, sinon en feuilletant les frais souvenirs de l’enfance ?

 Est-ce vrai qu’il n’est pas comme moi ?

 Les modes vestimentaires ou musicales précèdent souvent les réconciliations entre les peuples. La Conquête de l’Ouest américain et les chevauchées des cow-boys s’étalaient encore sur nos écrans quand le jazz réjouissait déjà les mélomanes de Paris comme ceux de la Nouvelle Orléans. Pendant les Croisades, la poésie et la musique de l’Espagne musulmane civilisaient les rudes chevaliers français en développant la courtoisie. Le célèbre fils de la reine Aliénor d’Aquitaine porte un nom propre composé : Richard Cœur de lion, le prince a disparu mais il garde pour toujours son titre « interculturel ». 

A force de porter des parures ou des habits d’ailleurs,  à force de danse sur des rythmes étrangers, ne peut-on espérer que battent des cœurs réconciliés sous l’étoffe des parkas nordiques et des jellabas ensoleillées qui réchauffent jeunes et moins jeunes. ?


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vendredi 23 septembre 2011

l'enfant Noir

Le beau livre de Camara Laye peut encore s’acheter par Internet, et bien que son auteur n’ait disparu qu’en 1980, il est à la fois très loin et très près des jeunes des banlieues qu’elles soient françaises ou, sans doute, africaines.

 En effet, il décrit et fait comprendre son éducation dans un petit village, riche d’une tradition séculaire, son intégration à la culture occidentale avec ses aspects douloureux et heureux.

 Ainsi, l’ancien ambassadeur de Guinée se trouve un exceptionnel ambassadeur de la mondialisation. Son courage et sa lucidité ouvrent des pistes intéressantes pour tous ceux qui affrontent au quotidien, dans la rue, dans les immeubles, dans les écoles et les loisirs eux-mêmes, le challenge des contacts interculturels.

CIFRI 

vendredi 9 septembre 2011

La recherche universelle de la sagesse

Le  livre « Quand deux fables se rencontrent » a été publié grâce au FAS. Il  raconte comment les premiers écrits de sagesse connus se trouvent dans le livre de « Kalila et Dimna » composé en Inde vers 300 de notre ère par un sage brahmane nommé Pilpaye pour le roi Dabchalim. Celui-ci ayant reconnu la sagesse de ce savant l’envoya dans tout le royaume apprendre à tous ses sujets comment vivre bien. Pour se faire comprendre à la fois des enfants et des adultes,  l’orateur racontait des histoires d’animaux dont les héros étaient des chacals : Kalila le sage et Dimna le fourbe. 


Le roi fut si content de cet enseignement qu’il en organisa une lecture publique devant les grands personnages du royaume et, pour récompenser Pilpaye, on enferma son livre dans le coffre-fort du palais royal, afin que les ennemis du pays ne puissent jamais s’en emparer et y apprendre la sagesse. Heureusement que la voix de Pilpaye était maintenue dans un livre car peu à peu celui-ci fut recopié puis traduit en Persan, dès le 6° s. puis en arabe vers 750. Ce livre finit par être connu en Europe, et les histoires elles-mêmes se répandirent en Afrique du Nord et même en Afrique de l’Ouest.

Extrait de « Une maison pour se comprendre » fascicule, paru en 2010 dans la collection de RECIT

vendredi 2 septembre 2011

De nouveaux bijoux pour l’Ecole


Comment ne pas se réjouir des articles de journaux, des universités d’été, des publications qui se pressent aujourd’hui autour de l’Ecole, cette ancêtre séculaire, pour l’habiller de neuf, renouveler ses chansons et la parer des traditions proposées par la mondialisation ?

Faut-il s’attrister des inquiétudes que cette effervescence trahirait ? ou plutôt que la victoire sur l’oubli dont l’Ecole est chargée de puis des siècles lui rende une nouvelle jeunesse.

 Dans le grenier de nos grands-mères traînaient des pratiques de transmission des connaissances oubliées, et voici que ces « dentelles » nous sont de nouveau présentées par la musique des rues, par les films de voyageurs au long cours, par des expositions islamiques ou africaines. L’importance du rythme, l’art de l’imitation, les diverses perceptions du temps et de l’espace aiguisent des curiosités qui, pour être différentes, n’en sont pas moins la richesse de l’intelligence. Le poids des expériences n’accable pas l’école, elle lui donne la force d’embrasser un monde nouveau.

CIFRI

mardi 23 août 2011

« Amkoullel, l’enfant peul » Actes Sud, Paris, 1991

Dans ses mémoires, Amadou Hampaté Bâ, ( 1900- 1991) le célèbre membre du Conseil exécutif de l’UNESCO, raconte son éducation pluriculturelle et longuement simultanée : selon les traditions séculaires du Mali, avec le maître de  l’école coranique, et les professeurs de l’école française. D’un caractère heureux et d’une intelligence brillante, il teinte d’un humour très optimiste ces expériences « d’oralité couchée sur le papier » qui lui ont permis d’entretenir son excellente mémoire jusqu’à un bien grand âge.

Son « grand fleuve du dire » introduit à une démarche enthousiasmante l’éducateur d’aujourd’hui qui a troqué le tableau noir pour l’écran informatique,  l’appartenance commune de ses élèves à une diversité culturelle presque insaisissable, et souvent l’autorité des parents biologiques contre la situation des « familles recomposées ».

 Grâce à son éditeur, le dicton africain « un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle » est ici mis en défaut.

CIFRI

jeudi 21 juillet 2011

Des mises en commun

Comme il devient réconfortant pour les éducateurs de se sentir partie prenante d’un effort mondial ! Le congrès international du Bureau International Catholique de l’Enfance s’est tenu le 23 mai à l’UNESCO de Paris  sur le thème « Droit à l’éducation des enfants en rupture familiale et sociale » A partir d’interventions de spécialistes d’Asie, d’Afrique, d’Italie et de Suisse il  a présenté l’importance de la complexe relation éducative entre les adultes et les jeunes et entre eux, les études médicales sur l’activité cérébrale pendant les temps d’apprentissage, l’influence cognitive des activités artistiques parce qu’elles expriment les réalités symboliques, les conséquences de l’éducation de tous sur les sociétés et la valeur sociale de l’action individuelle. 


L’Université d’été menée par RECIT à Meylan-Grenoble en juillet s’attachera au problème : «  Quelles transformations collectives pour reconstruire un mode solidaire ? »

CIFRI

vendredi 1 juillet 2011

A la mode

Les différentes campagnes de la Presse française qui sont en cours ces derniers mois mettent en plein jour le souci de l’éducation des enfants et des jeunes, y compris de ceux qui souffrent d’une rupture familiale ou sociale. Ces derniers échappaient très souvent aux recherches de ceux qui répondent aux propositions classiques et ils étaient comme transparents…Or, depuis peu l’Agence Nationale pour la Lutte Contre l’Illettrisme et d’autres organismes publics ou privés multiplient les recherches à leur bénéfice.

Ce qui est passionnant, c’est que les rencontres des chercheurs deviennent internationales et offrent à tous l’accès aux tentatives faites à partir de point de vue divers sous d’autres cieux.


Ces travaux sont devenus transversaux et devant la nouveauté de la mondialisation et de numérisation, ils mettent l’espérance à la mode et en éclairent à la fois les « excellents » et les « différents ».

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vendredi 24 juin 2011

une proposition de bibliographie du CIFRI

à partir des livres essentiels à ce propos des auteurs ci-après

Jean Piaget   Toute son oeuvre

Père Marcel Jousse « L’anthropologie du geste » Gallimard 2008           

Françoise Dolto Toute son œuvre

Bruno Bettelheim Psychanalyse des contes de fées  Robert Laffont 1976
                                 La lecture et l’enfant  Robert Laffont  1983

A propos de l’Ecole elle-même

 Célestin Freinet  « L’école moderne française » 1943

Marie Danièle Pierrelée  « Pourquoi vos enfants s’ennuient à l’école » Amazon, 2003

Jean Marie Petitclerc   « Lettre ouverte à l’école »  Bayard 200

Laurent Ott  « Rendre l’Ecole aux enfants » ENES 2007

A propos des traditions intellectuelles des autres cultures

Collectif publié par l’Unesco « Histoire de l’Ecriture »

Henri Petitmangin  Grammaire latine  Nathan 2008 

explique la philosophie de la structure de la langue

Alain Rey  « Dictionnaire amoureux des dictionnaires, Plon, 2011

 Pilpaye   « Kalila et Dimna »  publié par le FAS

Louis Gardet   « La Cité musulmane »  Vrin   1954

                          « Les hommes de l’Islam »  Hachette  1977 

Danielle Jacquart  « L’épopée de la science arabe »   Gallimard  2005

 Eric de Ronis   « Les yeux de ma chêvre »  Amazon  1982

Camara Laye  « L’enfant noir » Hatier 1953

Amadou Hampaté Ba   « Amkoullel, l’enfant peul », 1991          

CIFRI

mercredi 8 juin 2011

Les pierres de Lavaux

En face d’Evian, sur le bord suisse du lac, les vignes grimpent une côte raide grâce à de vieux murs de pierres qui étagent les vignes comme des marches d’escaliers. Depuis mille ans, « le vigneron monte à sa vigne…» dans « le pays des trois soleils » comme disent les habitants de Lavaux en associant  l’astre, sa réverbérance sur l’eau et encore les pierres qui en conservent la chaleur même la nuit. Voilà mille ans que des mains courageuses ont emprunté à la sombre forêt du Jura ce clair passage vers l’Est en protégeant les voyageurs des attaques dont l’antique château de Chillon n’arrivait pas à les protéger.
Plutôt que de livrer à la justice les misérables voleurs de la forêt, les bénédictins de Lutry ont remonté la terre, planté des vignes et appris aux va nus pieds comment gagner une vie heureuse, bien que la disposition du lieu permette toujours de s’échapper en bateau comme les truands qui emportèrent des sacs d’argent une nuit de maraude, il n’y a que vingt ans. Les moines aimaient ces brigands sans savoir, sans doute, qu’ils sculptaient pour eux un paysage reconnu aujourd’hui «patrimoine commun de l’humanité».

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mercredi 18 mai 2011

Je suis à l’heure


Drôle d’expression qui associe l’identité exprimée par le verbe être qui n’a justement pas de complément d’objet à l’heure qui n’est qu’une circonstance On comprend immédiatement la phrase, même si il y manque le mot « arrivé » pour introduire le « quand ». Serait-ce qu’en France, l’exactitude horaire fait tellement partie des qualités requises dans les rapports sociaux qu’elle serait une caractéristique de l’identité ? Alors, celui qui « n’est pas à l’heure » manquerait-il à sa propre dignité ?

Sous le dangereux soleil de l’Afrique, la tradition ne lie pas les comportements quotidiens au boîtier de la montre car l’heure est soumise aux nécessités de l’hospitalité. On mange quand on peut satisfaire sa faim, la dignité c’est de servir l’hôte avant soi.

A y regarder de près, l’heure n’a pas non plus toujours été précisée de la même manière en Occident. Elle  n’est pas si différente de nos ancêtres la maman africaine qui apporte aux jeunes un plat de friture au milieu de l’après-midi, même si cela trouble les projets des éducateurs.

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pour aller plus loin:
A la campagne c’était l’ombre du soleil qui divisait la journée en heures, et la cloche des abbayes précisait celles-ci. On se souvient du tableau de l’Angelus qui, en 1859, rendit célèbre le peintre Jean François Millet. Au XIV°siècle, les plaintes des patrons et des ouvriers à propos de leurs heures de travail avaient tellement encombré le Palais de Justice que le roi de France fit accoler la « Tour de l’Horloge » à son palais pour mesurer un temps « devenu de l’argent » en même temps que  se développement les travaux citadins.

 Cf.   J. Hillairet    Dictionnaire des rues de Paris    Ed de Minuit 

mercredi 11 mai 2011

Citoyenneté : Une forteresse ou un facteur de paix ?


Le mot vient des antiques Cités grecques mais il se refermait alors sur leurs habitants. Pourtant le manteau qui enveloppe ces citoyens est si précieux qu’il devient le présent des Romains aux autres peuples : grâce au « Droit Romain », la Pax Roman transforme des vaincus en alliés. Son chantre Cicéron, plaide, 63 avant Jésus Christ ! ses fameuses Catilinaires qui ont déjà les accents d’un René Cassin. Deux siècles après lui,  Caracalla oppose le Droit du sol à celui du sang, et propose à tout étranger qui sont sur les terres de l’empire romain de se flatter d’être citoyen romain pourvu qu’il soit libre. La Citoyenneté est « le rassemblement de tous ceux qui s’accordent sur certains principes modérés  ». Face aux Vandales qui envahissent la riche Afrique du Nord au V° siècle S. Augustin saluera « la multitude heureuse rassemblée par une reconnaissance commune du droit et une communauté d’intérêt » 

La citoyenneté est donc une affaire de cœur plus que de fortune, un honneur unissant droit et devoir dans une même dignité. Son éclat explique sans doute pourquoi elle reste toujours à conquérir comme la Dame des troubadours médiévaux.


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jeudi 5 mai 2011

Responsabilité individuelle ou collective

Quelques musées Français exposent des masques africains et le public en admire la ligne sculpturale souvent tellement remarquable que ces œuvres ont inspiré Picasso et ses amis. Mais savons-nous bien leur rôle ? Ces masques chargent celui qui les porte d’une responsabilité collective qui efface tout à fait son rôle individuel, on ne voit même plus son visage tandis que la robe de nos magistrats laisse apparaître leurs identités. Toutefois, il s’agit toujours de rappeler la conséquence collective de toute faute, par delà l’individualisme de notre époque.

Souvent, la discussion avec un drogué ou à son propos souligne la loi ou le danger, et elle suscite un déni difficile : « J’ai bien le droit, c’est de ma vie à moi qu’il s’agit, je fais comme mes copains…» mais si on invoque la responsabilité de l’exemple offert aux enfants, le discours du fautif change « C’est vrai que c’est dangereux , il faut protéger les petits » et il va se débarrasser du poison.

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mardi 12 avril 2011

Apprendre, mais comment ?

Notre époque ultra technique souligne la place de l’observation préalable aux acquis scientifiques. Mais l’histoire nous montre la diversité des modes d’attention et donc d’analyses ultérieures. Faut-il les opposer ou au contraire se réjouir de leur complémentarité ?

L’objet que je peux mesurer ou photographier ou découper, fait partie d’ensembles différents : La présence actuelle de mon sujet d’étude en appelle à une lignée dans la durée, autour de son support il y a un paysage, etc… On peut donc concevoir des méthodes différentes pour apprendre selon les cultures aux quelles les berceuses de notre première enfance nous ont préparés. La géométrie des décors arabes, d’un simple plateau de cuivre ou des mosaïques d’une coupole rutilante, n’additionne pas les singularités mais les place dans une relation étudiée, « un plus un » est aussi « un vers un ». L’Autrichien Mozart ne cherchait-il pas des « notes qui s’aiment ». Il n’est donc pas impossible pour des Occidentaux d’estimer une démarche intellectuelle qui part du collectif et non du singulier.

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mercredi 6 avril 2011

Apprendre ?

Certes, toute la vie humaine est un apprentissage, on parle aujourd’hui de formation continue en observant l’évolution des techniques et de l’économie. Autrefois, on ratifiait les étapes de la maîtrise des connaissances ou des métiers…Depuis le sphinx de Gizeh, il s’agit toujours d’une aptitude proprement humaine au progrès ! Ce qui étonne c’est que celle-ci ne se confond pas avec l’addition d’éléments disparates, mais avec le tri des informations, en omet beaucoup et intériorise définitivement celles qui ont été oubliées sept fois jusqu’à développer une culture, tant de la personne que de la société. Le respect des civilisations honore les Sages, c'est-à-dire ceux qui ont troqué leur force physique contre une expérience plus précieuse ; la canne du vieillard du sphinx est simultanément un appui et un signe d’autorité.

Pourquoi l’adulte se placerait-il au-dessus du jeune auquel il doit communiquer son savoir, puisque tous deux sont des « apprenants » ?

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mardi 29 mars 2011

La solidarité des connaissants

Jamais adultes et enfants n’ont disposé de tant de propositions d’information : facilité des déplacements, musées et exposition, Internet. La difficulté, maintenant, c’est de trier et d’organiser tous ces enseignements pour qu’ils soient « digérés » par chacun. L’Hébreu de la Bible parle même de « manducation de l’appreneur ». Et force est de reconnaître que, devant la toile, le gamin est plus à l’aise que l’adulte. Ils sont donc solidaires d’une même quête du savoir, chacun tenant son propre rôle puisqu’il s’agit d’une entraide bénéfique non seulement pour les deux protagonistes mais aussi pour ceux qu’ils en feront profiter.

Certainement, les erreurs, les fautes doivent être débusquées, mais cet affrontement au réel ne peut être positif que s’il est solidaire, c'est-à-dire qu’il exclue le mépris, à fortiori la vengeance d’un échec. Il s’agit d’associer des bonnes volontés pour réparer, et cela coûte à tous.

CIFRI

vendredi 25 mars 2011

La nécessité de l’initiative

Devant la disparité des traditions de la population, particulièrement celle des banlieues, peut-on se priver de motifs concrets pour donner le goût d’apprendre ? Faute d’un élan commun, n’y a-t-il pas risque de passivité ou d’oppositions des choix culturels ? Tandis que l’élaboration d’un projet commun qui associe tous les âges et les cultures peut offrir à tous un progrès.
Encore faut-il faire droit aux inventions de chacun et prendre le temps de les valoriser l’une par l’autre. Cela est possible si l’individu peut pousser son projet jusqu’à ce point où il rejoint l’universel, qui refuserait d’admirer les dentelles bretonnes ou bien les minarets de l’Andalousie ? Il y a donc un seuil qui ouvre le particulier à l’universel. C’est même le pari qui nourrit l’industrie du tourisme Si l’individu est interrompu dans l’expression de son projet, le repli engendrera l’opposition : « Ce n’est pas comme…» va supplanter : « C’est comme…» et priver l’entourage du bénéfice de sa collaboration.

CIFRI

mercredi 16 mars 2011

Sanctionner

On ne peut suivre un itinéraire sans s’assurer à chaque étape que le chemin parcouru est conforme à la décision de départ. S’il y a erreur, il faut retrouver la bonne route d’une façon ou d’une autre, même si cela est désagréable. Ainsi de la vie humaine, qui exige des « corrections » constantes. Le mot a pris deux sens presque contraires : la punition éprouvante supplante souvent le sens premier du réajustement. Tout se passe comme s’il s’agissait d’un dressage : « la peur t’empêchera de recommencer ».

Celui qu’on croirait le plus faible et qui ne serait pas associé à la restauration de son erreur risque de nourrir un vengeance en guise d’apprentissage et, ainsi, de détruire l’institution dans sa tête en renonçant à la collaboration La solidarité entre l’adulte et le jeune devant le réalité aurait renforcé leurs liens et préparé des réparations efficaces car ni celui qui sait ni celui qui apprend ne peuvent se passer l’un de l’autre et que le résultat de leur effort est finalement dans la main du plus jeune.

CIFRI

mercredi 23 février 2011

La fécondation réciproque des connaissances

Décrivant la rencontre d’un nouveau venu, on décompose souvent ses traits. On dit « Il est comme… » Peut-être, poursuit-on l’analyse des influences familiales qui l’ont formé, « Il ressemble à…Il est bien le fils de… » Et c’est finalement à travers ces précisions que nous faisons assez connaissance avec ce personnage pour l’intégrer au cercle de nos proches.
La société nouvelle que nous découvrons aujourd’hui n’est pas sans rappeler d’autres étapes de l’histoire humaine, d’où l’intérêt des livres qui développent ses origines historiques : c’est le cas du petit livre que Danielle Jacquart a publié en 2005 chez Gallimard dans la collection « sciences et techniques » sous le titre « L’épopée de la science arabe ».

Les illustrations facilitent grandement cette promenade autour de la Méditerranée car elle fait place à tous les échanges culturels qui ont construit notre savoir au fil du temps. De Bagdad à la Nasa, de l’Andalousie aux Universités, l’aspiration de l’intelligence humaine dépasse finalement les hostilités peureuses ou avides pour guérir les malades, émerveiller les astronomes et étendre le partage de la
connaissance à tous les continents.


CIFRI

mardi 15 février 2011

« Les Histoires de Walt Disney »

 « Qui est Charles Perrault ? Comment se fait-il qu’il dise la même chose que Walt Disney dont nous aimons bien les histoires ? » - « Moi, j’aime mieux les films comme la Belle et la Bête que les dessins animés, je trouve que c’est plus beau. » Sont-ils plus ignorants que nous ces jeunes qui ne retiennent que les images de la télévision alors que les jolies illustrations de nos livres d’images situent les contes de notre enfance en France, à l’époque de Perrault, alors que nous les partageons avec tant d’autres peuples.

Ces écoles de vie se sont adaptées aux détails de la vie de chaque peuple, ici on parlera de lampes et de torches ailleurs, mais la leçon reste la même. Car un conte n’est pas une histoire anecdotique, mais la transposition des situations humaines à un niveau si épuré qu’il devient général, c’est par là qu’il est école de sagesse et affleure aux questions philosophiques justement présentées pendant l’enfance avant qu’elles ne forment une synthèse à l’âge l’adulte.

Ce patrimoine commun aux hommes est le lieu idéal pour reconnaître nos ressemblances par delà nos différences, tels ces jeunes qui peuvent commencer le récit en Français puis passer la parole à un copain qui le continuera en arabe et laissera la fin à celui qui parle swahili chez ses parents.

CIFRI

Cf. « Quand deux fables se rencontrent »  publié grâce au FAS,

 
Les premiers écrits de sagesse connus se trouvent dans le livre de « Kalila et Dimna » composé en Inde vers 300 de notre ère par un sage brahmane nommé Pilpaye pour le roi Dabchalim. Celui-ci ayant reconnu la sagesse de ce savant l’envoya dans tout le royaume apprendre à tout le monde comment vivre bien.
Pour se faire comprendre à la fois  des enfants et des adultes, l’orateur racontait des histoires d’animaux dont les héros étaient des chacals : Kalila le sage et Dimna le fourbe.  Le roi fut si content de cet enseignement qu’il en organisa une lecture publique devant les grands personnages du royaume et, pour récompenser Pilpaye, on enferma son livre dans le coffre-fort du palais royal, afin que les ennemis du pays ne puissent jamais s’en emparer et y apprendre la sagesse. Heureusement que la voix de Pilpaye était maintenue dans un livre car peu à peu celui-ci fut recopié puis traduit en Persan, dès le 6° s. puis en arabe vers 750. Ce livre finit par être connu en Europe, et les histoires elles-mêmes se répandirent en Afrique du Nord et même en Afrique de l’Ouest.
C’est passionnant de chercher par quelles voies ces belles histoires ont passé pour aller à travers les terres des hommes qui sont toujours affrontés aux mêmes questions.



mardi 8 février 2011

du berceau à la place publique

 A qui viendrait l’idée d’installer son nourrisson à même le sol de la place de la mairie ? Dans tous les pays du monde, le berceau ou le tapis élargissent un peu l’espace des bras maternels qui ont accueilli le nouveau-né. Tant qu’ils peut toucher de ses mains les frontières qui délimite l’étendue de sa liberté, il ose de plus en plus user d’elle pour découvrir le monde et vient le jour des premiers pas qui inaugure l'autonomie du petit d’homme.  
Pour autant, peut-on imaginer qu’il va accéder immédiatement à la citoyenneté ?
Certes, l’Etat civil le compte parmi les membres de la nation, mais bien des peuples ont ignoré cette inscription tandis qu’aucun n’omettait les rites de passage à l’âge de raison et à l’entrée dans la communauté adulte. Ces fêtes montraient la liberté progressive d’une jeunesse confrontée aux limites humaines, y compris l’inévitable mort.
La précipitation du monde moderne télescope souvent ces séquences au point de s’étonner qu’un adolescent ne se reconnaisse pas une place dans son pays et se réfugie dans une bande ou, au mieux, un quartier dont il arpente les rues. Mais si ses pieds n’ont pas foulé des sols moins connus, si ses yeux n’ont pas regardé des témoins du temps passé, comment ce jeune pourrait-il adhérer à l’image d’une communauté dont il n’a pas eu le temps d’accepter les traits ?


CIFRI

Cf. Œuvres de Françoise Dolto



mercredi 2 février 2011

Apprendre, mais comment ?

Depuis toujours et dans tous les pays, les adultes ont transmis leurs connaissances à la génération suivante, et aussi les valeurs qui guidaient leurs choix. Cependant, les méthodes ne sont pas immuables puisqu’il s’agit de préparer l’enfant à un monde qui change, et parfois très vite ! en france, la « pédagogie spécialisée » a souvent joué le rôle de laboratoire pédagogique parce qu’elle jouit de plus de liberté que l’éducation nationale supposée convenir à tous « ceux qui n’ont pas de problème ». Mais les autres ?

Ainsi, comprend-t-on  l’importance donnée au rythme pour l’éducation des jeunes malentendants. Madame borel maisonny connaissait-elle les danses des africains quand elle imaginait le programme du « bon départ » ? En tous cas, elle se rappelait les « berceuses » qui calmaient les enfants de sa génération. Adulte, elle en savait encore les paroles et la musique, et elle cherchait pourquoi ces acquis lointains demeuraient inaliénables. 

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mercredi 26 janvier 2011

L’importance du regard

Dans nos campagnes, des saisonniers rompent la connivence des traditions provinciales par un langage et des usages différents ; que dire alors de nos Cités qui rassemblent le monde entier dans les murs des H.L.M. ? Souvent, chacun des résidents, et pas seulement les Français, déplore l’éclatement du confort de « l’entre soi ». Cette situation, irréversible maintenant, n’est-elle que négative ? N’y a-t-il que des dissemblances entre nous ? Comment discerner les hances qu’elles portent ?
Une anecdote tirera d’un jeune Français,  Sénégalais d’origine, un conseil avisé :Une conteuse développa le conte de Riquet à la Houppe rapporté par  Perrault en 1644 et, dès la fin de la descriptions des noces entre la princesse et l’homme qui avait traversé la terre pour la voir, un adolescent noir remarqua : « Chez nous, le marié ne sort pas de la terre, il traverse la mer en bateau, mais c’est le même problème, il vient de loin et ensuite elle quitte son pays à elle pour l’épouser. » Il continua : «  Est-ce qu’elle le trouve beau parce qu’elle est devenue assez intelligente pour se rendre compte qu’il est beau même si il n’est pas comme elle, ou bien est-il vraiment devenu beau à force d’aimer la princesse ? » et le garçon immigré de conclure « Cette histoire c’est la nôtre, maintenant. »

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Cf.   Vasconcelos  « Mon bel oranger »  s’achète seulement  sur Internet

jeudi 20 janvier 2011

Sanction ou restauration

La législation médiévale dispensait de leur peine civile certains coupables pourvu qu’ils effectuent la pénitence d’un pèlerinage. Une tradition analogue vaut encore pour le pèlerinage à la Mecque qui obtient le pardon du fautif, et on trouve le même usage du pèlerinage dans la plupart des civilisations.

Il ne s’agit pas d’une sanction forcément pénible - comme le châtiment corporel qui vise seulement à imprimer un souvenir suffisamment cuisant pour décourager de recommencer -  puisque la législation du pèlerinage prévoit que le délinquant délègue à un autre le soin de le représenter en payant son voyage. En effet le condamné était pris complètement en charge par la communauté des croyants pendant la durée de son voyage et mêlé anonymement aux puissants ou les dévôts qui effectuaient la même démarche sous un semblable costume. On pouvait donc être tenté de transformer la pénitence en agréables vacances.
Le vieux conte du « Chevalier au barillet » rapporté par Jérôme et Jean Taraud dans les « Contes de la Vierge » montre qu’il s’agissait de préparer un vrai retournement pour donner au vaurien l’occasion d’une métamorphose  intérieure. La restauration de la dignité du transgresseur était passagère pendant qu’il partageait la condition des autres pénitents mais au terme du déplacement de son milieu habituel et de la découverte des modèles humains qui l’ont précédé sur les mêmes chemins c’est une véritable réhabilitation qui était attendue.

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vendredi 14 janvier 2011

une leçon d’allemand

Le père d’Armand tenait le carnet scolaire de son fils, mal noté dans toutes les matières mais particulièrement en devoirs d’allemand. « pas de sport, pas de copain dimanche, tu passeras l’après-midi chez ta répétitrice, et je lui téléphonerai le soir pour avoir tes notes : » cette fois, l’adolescent ne pouvait esquiver la sanction, et il fut encore plus inquiet lorsque le professeur décida : « tu as de trop mauvais résultats, nous allons chez un autre maître que moi. » arrivés devant la salle pleyel, elle expliqua : « nous venons écouter le requiem de brahms » elle pressentait la sensibilité artistique de gamin et en même temps son manque de culture, et voilà qu’il se détendait, fasciné, qu’il laissait courir sur ses lèvres les mots allemands qu’il comprenait. en sortant, il demandait à étudier la grammaire et le vocabulaire du texte dans une langue qu’il commençait à apprécier. le disque accompagnerait la leçon ! le chenapan apprit à associer ses leçons à des souvenirs plus intimes et il finit bien ses études.
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vendredi 7 janvier 2011

Se souvenir ?

Les acteurs, les conteurs, les « anciens », marins ou paysans, surprennent les habitués des livres et des ordinateurs par les tirades qu’ils insèrent dans leur discours…et ils justifient souvent cette mémoire « orale » en évoquant des détails visuels attachés à leur apprentissage : Line Renaud précise, « je portais une robe de telle couleur », Olivier de Kersauzon décrit l’odeur de la mer dont il affrontait la tempête en reprenant la chanson : « il était un petit navire… » et la mélodie ressuscite sur ses lèvres, on dirait qu’associée aux embruns elle y reposait pour toujours.

Peut-on « apprendre » sans le concours des yeux, des oreilles, du nez qui rappelait à Camus l’odeur de ses livres de classe ? Mais, alors, quelle importance a la stabilité du cadre de la tradition des connaissances ! À défaut de rester dans la même salle de classe, la présentation des mêmes objets, témoins des matières enseignées, ne pourraient-elle pas faire partie de l’enseignement ?
 
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